En 2014, nous y ferons notre 100ieme voyage!

Dans l’éditorial du Ecourrier de la semaine dernière, je disais que le plus beau des voyages, le grand voyage, n’est rien d’autre qu’un poème. Cet édito est celui qui m’a valu le plus de commentaires en 15 ans. J’en déduis donc, avec grand plaisir, que Google n’est pas encore capable de me battre sur ce terrain.

Je reprends donc où j’avais laissé le Plaisirs et Délire en Himalaya. Dans le Ecourrier d’aujourd’hui, nous déclinons donc notre nouvelle offre en saisons… Nous avons retravaillé presque tous nos itinéraires et surtout nous vous les offrons aux meilleures saisons. Il y a des raisons logistiques, philosophiques et purement pratiques à ne pas vous offrir la même programmation au printemps qu’à l’automne bien qu’essentiellement, tous ces voyages puissent se faire aux deux saisons. Dans la section Immersion – les points forts – nous expliquons en détail pourquoi nous y allons à telle saison… ou pourquoi nous n’y allons plus! Un exemple concret, pour montrer la délirante variété du Népal, nous préférons maintenant le trek du Kangchenjunga en automne et nous proposerons le Manaslu au printemps (il est maintenant plus fréquenté en automne).

Allons-y aussi de jolies histoires humaines sur nos débuts au Népal et au Ladakh : comment nous avons rencontré le grand Babu Chiri et le surprenant Lobsang. Nous avons également demandé à nos guides ce qu’ils pensaient de l’Himalaya… C’est un peu comme si on demandait à un œnologue ce qu’il pense du plus grand vin français!
Enfin, pour faire durer le plaisir, je vous parle un peu plus, mais pas complètement encore, de cette longue traversée entre monde Tibétain et géants himalayens. Et surtout pourquoi je l’ai choisie.

Richard Rémy
Fondateur, président et guide de Karavaniers

1998, Karavaniers veut offrir des voyages au Népal. Pour trouver une équipe fiable, on écrit au Bureau du Tourisme à Katmandou. Quelques jours plus tard, on reçoit un fax. L’homme qui nous contacte dit avoir grimpé l’Everest à plusieurs reprises et veut nous offrir ses services pour organiser des treks au Népal. La lettre est signée Babu Chiri Sherpa. Babu Chiri Sherpa?!? Comme dans Babu Chiri Sherpa, l’homme qui détient le record d’être resté 21 heures au sommet de la plus haute montagne du monde, sans oxygène?!? Ça doit être une blague de mauvais goût… Après quelques jours, on reçoit un deuxième fax. « Vous savez, je suis un homme sérieux. Je veux vous aider à organiser des treks au Népal.» Signé, Babu Chiri Sherpa. Est-ce que ça peut être possible? Le vrai Babu Chiri Sherpa veut travailler avec nous? Richard Rémy se rend donc à Katmandou pour rencontrer cet homme qui prétend être Babu Chiri Sherpa et qui dit vouloir nous aider à organiser des treks au Népal…

Et par heureux hasard, ce fameux fax dit vrai…

Une longue collaboration débute alors. D’abord la création de treks audacieux, d’ascensions de montagnes dont les sommets n’ont jamais été atteints par aucun Québécois, mais aussi de beaux projets comme la construction d’une école au Népal. À ce jour, Karavaniers continue, via la Fondation Babu Chiri Sherpa, de contribuer aux salaires des professeurs.

Babu Chiri Sherpa a atteint le sommet de l’Everest à 10 reprises, sans jamais avoir recours à des bouteilles d’oxygène. Il a établi plusieurs records sur l’Everest dont 2 encore jamais égalés : 2 ascensions en 2 semaines et 21h au sommet, sans oxygène (visionnez sa vidéo au sommet de l’Everest). Babu Chiri Sherpa est décédé sur la montagne en avril 2001, en tombant dans une crevasse.

Janvier 2000, nous débarquons à Leh, haute capitale du Ladakh située à 3700m. À l’horaire, repérage et guidage sur la rivière gelée (Tchadar). À cette époque, il n’y que 2 vols par semaine sur des avions incertains. Au dehors, deux jeeps nous attendent. À notre étonnement, les véhicules se présentent avec un joli logo Karavaniers. Or, nous n’avions encore jamais fait d’autocollants! Vérification faite, Lobsang était allé sur internet (denrée rare) et avait décalqué notre logo et fait faire les collants. Le voyage commençait bien.

Nous sommes reçus comme des rois en cet hiver tibétain. Comme il se doit, pourrait-on dire. Mais après quelques discussions, je m’aperçois que Lobsang est particulièrement dévoué. Même au-delà de ce que peuvent être naturellement et culturellement les bouddhistes. Alors je lui pose la question et il me répond avec son style… celui des Ladakhis qui s’apparente plus à celui des Tibétains (direct) que des Népalais.

- Lobsang, you seem to take care of us more than other companies. Why?
- Karavaniers is, and will always be, the most important company for us.
- Why Lobsang? We bring you only 2 or 3 groups a year.
- Money is not important. One night I dreamed I would see a man with a red jacket and he would be very important because I can start my company. This man would be from North America… but not United States (!). If I take care of this man, I will be able to make a living from tourism.

Vous devinez qu’à l’époque, nous avions des vestes rouges!

Il y a environ 10 fois moins de touristes au printemps (et 100 fois moins en hiver!). Juste cela  justifie d’y aller à cette époque. Et la nature est plus généreuse : en basse altitude (moins de 3000m), les fleurs explosent. Mais la mousson approche et avec les changements climatiques, nous avons décidé de nous éloigner le plus possible de mai car la pluie commence à faire glisser le terrain et la neige à bloquer cols et sommets.

Savez-vous que l’Himalaya est le résultat d’un bloc de terre qui a migré de l’Afrique du sud pour entrer en collision avec l’Asie? Ce faisant, il a projeté le fond des océans au sommet de la chaîne du Zanskar, il a fait bouillir la roche pour donner le granit du plateau tibétain et a formé, évidemment, la plus formidable barrière géologique qui soit. L’été, l’humidité de l’Inde vient s’y frotter : c’est la mousson. Il faut donc, si on veut voir l’Himalaya en été, la regarder par le nord…Au Ladakh par exemple.

On dit que c’est la meilleure saison. C’est peut-être vrai mais nous ne croyons pas, chez Karavaniers, qu’un endroit se limite à ses conditions climatiques. Si on ne fait pas attention, il y aura trop de gens sur les sentiers. Il faut donc chercher plus loin. L’Everest oui mais par Thame. Surtout le Kangchenjunga pour un survol complet des plaisirs himalayens. Et encore Le pays sherpa… Ah lui, toujours et en toutes saisons! Et évidemment cette étoile filante en terre de Mustang et de Phu.

Un trek au coeur de l’Himalaya! À 6476 mètres, le Mera est le plus haut sommet himalayen accessible à l’apprenti-alpiniste. Ce voyage propose un beau trek comme marche d'approche et l'ascension d'un 6000m... un peu comme la cerise sur le sundae!

Approcher le camp de base de l'Everest par la vallée de Thame et les cols de Cho et Renjo.Il s'agit probablement l'itinéraire le moins fréquenté pour atteindre le camp de base de l'Everest, sans oublier l'ascension du Kala Patthar.

Une variante plus spectaculaire et beaucoup plus intéressante que le simple aller-retour qui mène directement au camp de base de l’Everest : ce trek vers Gokyo propose des étapes décalées pour éviter les foules, un passage par les lacs de Gokyo et le col de Cho La, et la montée du Kala Pattar.

En 1999, avec mon grand ami Pascal Guillaume (à qui je dois une grande partie de mes connaissances de l’Himalaya), j’arrivais du Tour du Manaslu, ce qui était franchement audacieux à l’époque. Il nous fallait un autre voyage fou, un délire (ce que nous appelons les Étoiles Filantes). Le Mustang, royaume interdit, était ouvert depuis 3 ans… C’est donc dire que moins de 100 personnes avaient vu ce monde étrange. Michel Peissel et Giuseppe Tucchi nous en avaient parlé dans de bien beaux livres mais il nous fallait le voir. Sur une Guinness (accompagné d’un brownie!) au New Orleans, pub légendaire de Katmandou, nous avons décidé avec toute l’insolence et l’insouciance de nos 30 ans d’y aller, mais en hiver. Un voyage ne devrait-il pas se décider comme cela? Avec la légèreté d’un papillon pour vaincre tous les obstacles? Mais cela posait un problème : non pas que les permis soient difficiles ou coûteux, ils n’existaient tout simplement pas… en hiver. Sommes-nous les premiers à y avoir mis les pieds? Probablement mais cela importe peu. Sur la marche de retour, une vallée partait vers l’est et nous avions quelques jours d’avance sur notre itinéraire. Allons voir! Au bout, un petit monastère si haut perché qu’il n’est pas inutile de croire en la réincarnation pour s’y rendre : Luri. Révélation qui se confirmera par la suite (des études), nous étions en présence d’un chef d’œuvre. Nous savions aussi qu’encore plus à l’est il y avait une crête et un lieu sacré : Damodar. En fait non, ce sont nos amis sherpas qui nous l’ont dit. Mais nous n’avions pas le droit d’y aller, c’était réservé aux bouddhistes et aux hindous. Nous, bêtes scientifiques, n’étions motivés que par la curiosité… puissant moteur de découverte. De toute façon, il y a avait aussi un col, très haut, dans la neige. Lui aussi interdit en 2000.

Pour se remettre dans le contexte, à l’époque, tous les treks en région contrôlée devaient se faire avec un officier de liaison dont le travail n’était rien d’autre que celui d’un policier. Et en général, un policier  qu’on envoi en punition! Imaginez, marcher et camper en hiver dans les montagnes… Pour ça, il fallait donc avoir sa permission. Pascal et moi décrétons, soi-disant pour le bien être du groupe, une journée de congé. Le plus heureux, vous devinez c’était Kumar (je crois que c’était son nom). Le lendemain donc, après le déjeuner… et après quelques tractations stratégiques (et la promesse d’une bière au retour), l’heureux Kumar au repos nous déclare : Today I dont work so I dont know where you going… Nous avons sommes montés, avons glissé sur une rivière (c’était l’hiver) pour voir loin. Nous avons vu des habitations troglodytes. Damodar était trop loin. Le col encore plus. Mais à ce moment nous nous sommes promis d’y revenir. Et d’aller très loin. Le sort en a décidé autrement puisque Pascal est décédé il y a 2 ans. Mais l’an dernier, je suis retourné à Luri et à ce moment, avec Tendee Sherpa, notre fidèle allié, je lui ai dit que nous reviendrions.

Le Mustang nous permettra une acclimatation facile, une expérience culturelle intense et pour nos yeux… il  nous déroulera ses paysages austères, coincés entre l’Himalaya et le plateau tibétain. Ensuite, il faudra chausser les bottes de montagne pour franchir ce col de Saribung, à plus de 6000m. Ceux qui veulent, si le temps le permet, pourront aller au sommet quelques 300 m plus haut. Mais attention, ce sera un voyage pour de solides marcheurs, avides de culture et de nature, pas pour des grimpeurs qui veulent faire des sommets. La montagne sera un bonus, pas un but. Ensuite, repos dans le joli village de Phu, perché à flanc de montagne. Ensuite Naar. Nous ne pourrons éviter l’autoroute de l’Annapurna un jour ou deux, comme un clin d’oeil pour nous faire réaliser l’unicité de notre traversée avant de descendre au sud, vers le massif de l’Annapurna, là ou le premier conquérant d’un 8000 m, Maurice Herzog, s’est rendu compte qu’il ne montait pas, comme il le pensait, vers le Daulaghiri. Les cartes sont  meilleures aujourd’hui… mais pas tant que ça heureusement. Cap vers le sud donc, mais pas vers la facilité parce que deux cols se dressent encore au-dessus de 5000m avant de rejoindre ce lac de Tilicho.

Depuis ce premier voyage au Mustang, presque 15 ans maintenant, le trek s’est beaucoup développé et quelques groupes ont franchi ce col depuis 2008 ou 2009. Mais on parle de quoi? Une trentaine par année depuis 3-4 ans? 100 personnes ont vu Damodar? Ce n’est pas si important sinon de dire que nous aurons une expérience aussi forte que les montagnes. Et, sans fausse modestie, nous irons plus intimement au Mustang, nous prendrons des journées de congé, Tendee et Passang y seront. Oui je pense que ce sera un très grand voyage.

En terminant, ce voyage ce n’est pas, à proprement parler, un hommage pour mon ami Pascal. Mais un peu quand même. Parce que je vais le faire exactement comme il l’aurait fait : pour lui! Égoïstement! Je sais déjà que je vais trouver des fous et des folles pour le faire avec moi. Et il sera, mon vieux crouton, un peu jaloux car c’était là notre plaisir… se rendre jaloux l’un l’autre en poussant l’audace.
Continuez à m’écrire à mon mail personnel et pour Noël… je vous envoie la fiche technique… toute en vers de 2 pieds*.

Richard Rémy
richard@karavaniers.com

*blague de l’un de nos meilleurs voyageurs, à la lecture de l’édito de la semaine dernière. Guy… tu y seras, non?

Il peut être difficile de choisir son voyage devant autant de choix. Nos spécialistes voyage et guides sont toujours disponibles pour vous aider à déterminer quel voyage vous convient le mieux.

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